S’il en fallait encore une, voici une nouvelle étude mettant en exergue la toxicité non monotone du bisphénol-A. Dit autrement, cela prouve, une fois de plus, que les effets des perturbateurs endocriniens ne sont absolument pas proportionnels à la dose. Cela met à mal la toxicologie règlementaire qui s’appuie systématiquement sur le fameux « C’est la dose qui fait le poison » de Paracelse (1493-1541), alors que ce paradigme ne s’applique absolument pas au perturbateurs endocriniens pour lesquels « c’est la durée et la période d’exposition qui fait le poison ».
« Une approche morphométrique et statistique combinée pour évaluer la non-monotonie
des effets du bisphénol A sur la glande mammaire des rats en développement dans l’étude CLARITY-BPA »
(Publiée le 20 Mai 2020)
Résumé :
Contexte • Le Consortium Linking Academic and Regulatory Insights on Bisphenol-A (CLARITY-BPA) est une rare collaboration d’études (de base) conformes aux lignes directrices et d’études universitaires basées sur des hypothèses pour évaluer les effets du bisphénol A (BPA).
Objectifs •
a) déterminer si le BPA a des effets sur la glande mammaire du rat en développement en utilisant de nouvelles méthodes quantitatives et semi-quantitatives établies dans deux laboratoires ;
b) développer un outil logiciel pour l’évaluation automatique des aspects quantifiables de l’arbre canalaire mammaire ;
c) comparer ces méthodes.
Méthodes • Des rats Sprague-Dawley ont été ou non exposés au BPA ou à un dérivé oestrogénique [éthinylestradiol (EE2)] (témoin positif) par gavage oral à partir du jour de la gestation (GD)6 et en continuant avec un dosage direct des petits après la naissance. Deux études ont été réalisées : l’une subchronique et l’autre chronique. Cette dernière utilisait deux régimes d’exposition, l’un s’arrêtant au jour postnatal 21 (PND21) (« stop-dose ») et l’autre continuant jusqu’au prélèvement des tissus (« continu »). Les glandes ont été prélevées à de multiples moments et analysées à l’aveugle (c’est-à-dire sans sans savoir de quels rats elles provenaient).
Résultats • L’analyse semi-quantitative de l’étude subchronique n’a révélé aucune différence significative entre le groupe témoin et le groupe ayant reçu la dose de BPA jusqu’au PND21, alors que pour le traitement jusqu’à PND90, il y avait des différences significatives entre, d’une part, le groupe témoin et celui ayant reçu la plus faible dose de BPA, et d’autre part, entre le groupe témoin et celui ayant reçu la plus faible dose d’EE2 chez les animaux en période d’œstrus. L’analyse quantitative automatisée des échantillons chroniques de PND21 a montré des effets non monotones du BPA, avec un point de rupture entre les 25 et 250μg/kg de poids corporel (BW) et par dose journalière. Ce point de rupture a été confirmé par une analyse statistique globale des animaux d’étude chroniques au PND90 et 6 mois analysés par la méthode quantitative. La réponse du BPA était différente de l’effet de l’EE2 pour de nombreuses caractéristiques.
Conclusions • Les méthodes semi-quantitatives et quantitatives ont toutes deux révélé des effets non monotones du BPA. L’analyse quantitative non supervisée a utilisé 91 mesures et a produit les courbes dose-réponse non monotones les plus frappantes. À tout moment, des doses plus faibles ont entraîné des effets plus importants, ce qui est conforme à l’étude de base, qui a révélé une augmentation significative de l’incidence d’adénocarcinomes mammaires chez les animaux ayant reçu la plus faible dose de BPA testée. https://doi.org/10.1289/EHP6301
Accéder à l’étude complète sur le site de « Environmental Health Perspectives » (en anglais)…