Perturbateurs endocriniens : la France de Monsieur Hulot donne raison à l’industrie

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Le 4 juillet, les représentants des Etats membres de l’Union européenne votaient une définition réglementant les perturbateurs endocriniens, des molécules toxiques. Alors que la France s’était, depuis juin 2016, systématiquement opposée au texte, trop laxiste, le gouvernement français a cette fois voté pour… et fait basculer le scrutin. Les perturbateurs endocriniens sont encadrés, mais de façon irresponsable ! Même si tout n’est pas encore joué…

 

Après avoir pris trois ans de retard, et finalement retouché le texte initialement présenté en juin 2016, l’Union européenne vient, par vote, de valider une définition des perturbateurs endocriniens (PE), ces molécules qui miment les hormones et sont susceptibles de modifier leur sécrétion, leur action ou leur devenir et perturbent ainsi le fonctionnement d’un organisme, accusées également de perturber le système nerveux.

 

Si ce texte avait eu tant de mal (7 votes) à se faire accepter, c’est notamment parce que trois nations – la Suède, le Danemark et la France – s’y étaient toujours montrés hostiles, jugeant, à raison, cette définition trop laxiste. En d’autres termes, ces pays avaient compris qu’en validant un tel texte, ils exposaient les citoyens européens à certains PE avérés, tout simplement parce que les critères retenus étaient trop restrictifs.

 

L’industrie, grande gagnante

 

Et si les deux Etats scandinaves ont tenu bon face à la pression de l’Allemagne, désireuse de donner un coup de main à l’industrie agrochimique, la France a quant à elle changé de bord. Grave revirement puisque l’adhésion de l’Hexagone a donné la majorité à cette définition. Pour faire plus gentiment passer la pilule, les ministres français de l’Environnement, la Santé et l’Agriculture affirment avoir obtenu des « garanties supplémentaires » de la part de la Commission européenne, censées accentuer un peu plus le contrôle.

 

Une avancée bien insuffisante ! Trois sociétés savantes – l’Endocrine Society, la Société européenne d’endocrinologie et la Société européenne d’endocrinologie pédiatrique – avaient manifesté leur inquiétude à la mi-juin, en envoyant un courrier aux 28 ministres de l’Environnement des Etats membres pour les mettre en garde face au danger pour la santé publique que représentait ce texte. Ils réclamaient notamment une échelle graduée du risque, de façon à inclure également les PE suspectés, présumés ou avérés en fonction de l’avancée des recherches. Dans la foulée, la coalition EDC Free Europe, regroupant 70 organisations de la société civile, écrivait à Nicolas Hulot, ministre français en charge de la Transition écologique, lui exhortant de voter contre. Sans succès.

 

Les députés européens ont encore la main…

 

Ironie du sort : si M. Hulot n’hésite pas à parler d’une « avancée considérable », la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’Homme y voit plutôt « une définition au goût amer ».

 

Malgré l’approbation de la définition des PE, la directive n’est pas encore mise en place. Les députés européens disposeront, à partir de l’émission de la notification officielle émanant de la Commission européenne, de quatre mois pour adopter une résolution qui s’y opposerait, et qui recueillerait la majorité absolue des suffrages. Les Verts tentent de s’organiser et espèrent convaincre des collègues dans les autres groupes parlementaires pour pouvoir s’opposer au texte. Une mission qui semble bien mal engagée…

 

Milliers de victimes en perspective

 

Le Criigen ne peut que déplorer ce revirement de la France qui, en votant en faveur de ce texte, permet la poursuite de la  commercialisation de molécules qui sont bien des perturbateurs endocriniens et nerveux, et prive ainsi les citoyens européens d’une protection contre ces substances. A l’instar du bisphénol A, il faudra alors attendre des années et des milliers ou millions de victimes avant de daigner retirer ces molécules du marché…

 

Force est de constater que nos ministres de l’Environnement et de la Santé ne sont pas aptes à protéger la santé de la population, ni même celle des écosystèmes dont nous dépendons. Ils ont pris le parti de l’industrie chimique et agricole et ont oublié la Charte de l’Environnement promulguée le 28 février 2005 sous forme de loi constitutionnelle, laquelle énonce dans son article premier que « chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et favorable à sa santé ».